Cette pièce de théâtre, qui se joue depuis au moins un an à Paris, a été diffusée récemment sur Paris Première. Comme son nom l'indique aux initiés, le sujet en est l'échangisme. Ou peut-être pas.
France, le personnage principal, est scénariste de cinéma. Elle est le nègre d'un réalisateur, Bernard, qui est aussi son ex. Il lui a commandé un scénario traitant de la première visite d'un jeune couple dans un club échangiste. Il n'est pas content du résultat, qu'il juge digne d'un film pornographique. Se doutant (avec raison) que France n'a pas l'expérience du libertinage qu'elle prétend avoir, il lui présente donc sa maîtresse du moment, Sharon, qui elle est une habituée.
Ne lisez pas la suite si vous comptez voir la pièce !
Le résumé précédent occupe les dix premières minutes de la pièce. Sharon et France ne s'entendent pas : France veut écrire seule, elle n'a pas envie d'avouer qu'elle ment sur ses sorties en club ; Sharon est une "provinciale" caricaturale : extravertie, sans culture, naïve. Bref bête. (Saviez-vous que l'intelligence est inversement proportionnelle à la distance qui vous sépare de la tour Eiffel. Si, si, c'est même marqué dans Wikipédia, alors.)
Bref, Sharon raconte quand même ses expériences. Poussés par Bernard, ils vont même tous les trois mimer une visite dans un club libertin, avec Sharon en maîtresse de cérémonie. Sa technique d'approche consiste à "draguer la femme, puisque toutes les filles sont bis en club, n'est-ce pas". France est choquée, puis troublée. La scène est jouée avec une finesse digne d'un film en noir et blanc, il est donc impossible de passer à côté de l'évolution de France, qui se fait en l'espace de 45 secondes environ.
On a donc ensuite une histoire d'amour entre France et Sharon, au grand dam de Bernard dont on apprend qu'il n'est très doué au lit de toute façon. France, qui une demi-heure avant voulait écrire seule, offre un stylo à Sharon ; c'est beau parce que c'est symbolique.
Je ne vous raconte pas la fin, c'est à voir.
L'échangisme n'est qu'un des thèmes d'une pièce qui n'en manque pas. Le libertinage est le déclencheur, mais il disparaît à mi-course pour ne plus revenir. La bisexualité féminine prend le relais, relevé in extremis en ménage à trois. En plus de cette exploration du "désir féminin", la pièce s'intéresse aussi au rôle de l'auteur et plus particulièrement du nègre. La chute est d'ailleurs tout à fait dans ce registre. Il y a aussi un faux maître tantrique-vrai voyeur que France contacte par webcam, et qui sert de ressort comique (bof) et de réceptacle à exposition. Enfin, un marivaudage amoureux classique enrobe le tout.
Il y a quand même deux trois choses à sauver dans la pièce :
- La description des clubs est à peu près correcte, et surtout pas négative. Bon, je n'ai pas trouvé le récit de Sharon très cohérent. Elle décrit une partie discothèque assez calme, avec des couples qui s'échangent des regards et discutent paisiblement, puis un comportement en alcôves qui évoque plutôt le gang band, avec une fille isolée autour d'une dizaine de gars.
- Quand Bernard finit par être convaincu que France est libertine (suite à un quiproquo), il est tout émoustillé et tente de la reconquérir. Inversement, une fois Sharon casée avec France, elle est scandalisée par la demande de cette dernière d'aller enfin en club, alors qu'elle lui avait proposé au début de la pièce, quand elles étaient anonymes. Non seulement ces réactions me paraissent bien vues, mais en plus elles sont moins signalées au néon que le reste de la pièce. J'aime bien avoir des choses à comprendre ou à voir de moi-même.
- La pirouette finale est intéressante. Elle aurait presque mérité d'être plus développée. Du coup, on est un peu privé d'une vraie fin.
Jupe obligatoire passe à côté du thème annoncé. Les personnages ne vont pas en club échangiste au cours de la pièce. Un seul sur les quatre y a déjà mis les pieds (quoique j'ai un doute sur Bernard ... peut-être deux). On ne peut pas dire que le thème soit survolé. C'est plutôt qu'il n'est qu'un élément d'un tout plus complexe, et pas forcément très lisible.
lundi 16 mars 2009
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Bonjour à tous les deux !
RépondreSupprimerNous nous sommes donc arrêtés aux dix premières lignes...
Bises libertines
L'avez-vous enregistré ou comptez-vous la voir au théâtre ? Je ne suis pas sûr que la pièce vaille le déplacement. Tout les goûts sont dans la nature et tout ça, mais j'ai quand même trouvé toute la partie burlesque pathétique et l'ensemble plutôt médiocre.
RépondreSupprimerSi seulement Yasmina Reza pouvait faire une pièce sur le même thème...